Fata Morgana
Thibaude (Feutrine)
Tirages grand format
Il y a plusieurs années j’avais réalisé une série de photographies à la chambre argentique avec un matériau qu’on appelle « thibaude », une feutrine utilisée dans le bâtiment. Je voulais expérimenter une technique particulière de double exposition en vue d’obtenir un effet de profondeur dans cette surface parfaitement plate. L'expérience terminée, ces images furent vite archivées (à qui pouvaient intéresser des photos de feutrine à poils colorés ?) et les années ont passé. Puis, un jour, elles ont refait surface. En les regardant plus attentivement j'ai alors remarqué quelque chose : chaque fois un dessin se profilait en filigrane derrière ces mélanges aléatoires des fibres et des poils. Etait-ce simplement le fruit du hasard ou bien je l’avais déjà pressenti, de façon presque inconsciente, à l’époque de leur réalisation ? Quoi qu'il en soit, cela paraissait m'attendre patiemment depuis un bon moment.
Il faut se placer à la bonne distance. Surgis de nulle part, entre illusion optique et réalité, on apérçoit alors des façades, des éléments architecturaux, parfois des visages. Quel est donc ce lieu? Magie de la photographie qui, par son oeil patient, impitoyable, nous invite à mieux regarder le monde, à écarter le voile des apparences pour entrevoir en chaque chose un fragment de la cité des dieux.